Texte performé à l’occasion de l’exposition “Message personnel”, à la Tour Orion en décembre 2023, et librement inspiré par les œuvres de l’artiste plasticienne Kwama Frigaux, qui transforme les remèdes à nos migraines, les témoins de nos douleurs, les déchets de nos névroses – à savoir les emballages de médicaments – en beauté.


Commissariat d’exposition : Nicolas Jaeger & Delphine de la Roche.





extrait: “(...) Elle semblait toujours là et perpétuellement ailleurs. Elle était assiégée dans son propre corps par un cheval de Troie inconnu. Jamais, pourtant, jamais, je vous le jure, elle n’a utilisé le mot de « drame » ou de « tragédie » à son endroit. Loin du chahut du monde, dans sa souffrance, elle s’était ouverte à une sorte de voyance, elle s’élargissait chaque jour à des dimensions inconnues de moi, de vous, et à son apparence immobile répondaient d’autres transports vers des destinations, des exaltations qui m’échappaient. Pour tenter de comprendre l’insondable, je me disais au début qu’elle ouvrait son système nerveux à d’autres fréquences, qu’elle avait développé des sens dont on disposait toustes mais qui demeuraient chez le commun des mortels atrophiés, et le blast les avait révélés chez elle. Elle répétait souvent, dans un murmure : je ne savais qu’il y avait tout ça, si proche de nous, que tout était si peuplé. Elle disait que tous nos esprits étaient reliés par des fils, invisibles à ceux et celles qui n’y prêtaient pas attention, et que si les gens apprenaient, enfin, à voir, ils verraient ce qu’elle voyait. Elle avait la force de conviction des convertis et des croyants, mais j’avais beau me frotter les yeux, je ne voyais rien. (...)”